mercredi 27 janvier 2010

Chet Baker Live (Belgium 1964) : Time After Time

"-Oui, peut-être, oui, c'est bien ça. Tu as raison, j'ai tout perdu, et je suis perdu. En pleine confusion. Sans attache. Je ne suis plus rattaché qu'à ici.
Je m'interrompis pour regarder ma main éclairée par la bougie.
-Mais je sens que quelque chose essaie de se rattacher à moi. C'est pourquoi en rêve quelqu'un a besoin de moi, quelqu'un pleure pour moi. Je cherche à me rattacher à quelque chose, c'est sûr. Tu vois, j'ai envie de recommencer à zéro. Et c'est pour ça que j'ai besoin de ta force."
Haruki Murakami, Danse, danse, danse, Paris, Seuil, 1995 p 132

"-Sí, puede ser, sí, es justo eso. Tenés razón, perdí todo, y estoy perdido. En plena confusión. Sin ataduras. A lo único que estoy atado es a este lugar.
Me interrumpí para mirar mi mano iluminada por la vela.
-Pero siento que algo trata de aferrarse a e mí. Es por eso que en sueños alguien me necesita, alguien llora por mí. Busco aferrarme a algo, es cierto. ¿Te das cuenta? tengo ganas de volver a empezar de cero. Y es por eso que necesito tu fuerza."

vendredi 22 janvier 2010

L'attente

"Pour ne pas trop énerver mon attente ne laissez pas traîner huit jours dans votre poche la lettre que vous aurez la bonté de m'écrire. J'ai reçu des lettres de vous qui, au lieu de douze heures, ont mis quatre jours."
Marcel Proust à Reynaldo Hahn, le 22 septembre 1894.
Jean-Yves Tadié, Marcel Proust, Paris, Gallimard, pp 243-244



Gustave Moreau
Orphée (1865)
Huile sur bois
155 x 99, 5 cm

["Para no enervar demasiado mi espera no lleve de aquí para allá durante ocho días en su bolsillo la carta que tendrá la amabilidad de escribirme. He recibido cartas de usted que, en vez de doce horas, han tardado cuatro días."
Marcel Proust a Reynaldo Hahn, 22 de septiembre de 1894]

samedi 16 janvier 2010

Un but

"Pour arriver à créer quelque chose dans la vie, il faut un but, ensuite on progresse à coups d'essais et d'erreurs."
Haruki Murakami, Danse, danse, danse, Paris, Seuil, 1995, p. 235





Kasimir Malevitch
Autoportrait à deux dimensions (1913)

"Para llegar a crear algo en la vida es necesario un fin; inmediatamente uno progresa, a fuerza de intentos y de errores."

jeudi 14 janvier 2010

One Art - Un Art - Un Arte

One Art

The art of losing isn't hard to master;
so many things seem filled with the intent
to be lost that their loss is no disaster,

Lose something every day. Accept the fluster
of lost door keys, the hour badly spent.
The art of losing isn't hard to master.

Then practice losing farther, losing faster:
places, and names, and where it was you meant
to travel. None of these will bring disaster.

I lost my mother's watch. And look! my last, or
next-to-last, of three beloved houses went.
The art of losing isn't hard to master.

I lost two cities, lovely ones. And, vaster,
some realms I owned, two rivers, a continent.
I miss them, but it wasn't a disaster.

- Even losing you (the joking voice, a gesture
I love) I shan't have lied. It's evident
the art of losing's not too hard to master
though it may look like (Write it!) a disaster.

Elizabeth Bishop



Larry Poons (artist)
Tristan da Cugna, 1964
liquitex on canvas
overall: 183.1 x 366.2 cm (72 1/16 x 144 3/16 in.)

Un Arte


El arte de perder no es difícil de dominar;
Tantas cosas se ven llenas con el propósito
De ser perdidas, que su pérdida no es un desastre.

A diario pierde algo. Acepta la perplejidad de no encontrar
Las llaves de la puerta, la hora malamente gastada.
El arte de perder no es difícil de dominar.

Practica después perdiendo un poco más, más rápido.
Lugares y nombres y donde pretendías
Viajar, ninguno de estos traerá un desastre.

Perdí el reloj de mi madre. ¡Y mira! Mi última, o
Penúltima, de mis tres queridas casas se fueron.
El arte de perder no es difícil de dominar.

Perdí dos bellas ciudades. Y aún más vasto,
Algunos de mis reinos, dos ríos, un continente.
Sí, los extraño, pero aún así no causaron ningún desastre.

-Hasta perderte (tu voz burlona, un gesto
que amo) No debí haber mentido. Pero es obvio
El arte de perder no es tan difícil de dominar
Aunque parezca (escríbelo) un desastre.

[Traducción de Laura Jileta]


Un Art

Dans l'art de perdre il n'est pas dur de passer maître ;
tant de choses semblent si pleines d'envie
d'être perdues que leur perte n'est pas un désastre.

Perds chaque jour quelque chose. L'affolement de perdre
tes clés, accepte-le, et l'heure gâchée qui suit.
Dans l'art de perdre il n'est pas dur de passer maître.

Puis entraîne toi, va plus vite, il faut étendre
tes pertes : aux endroits, aux noms, au lieu où tu fis
le projet d'aller. Rien là qui soit un désastre.

J'ai perdu la montre de ma mère. La dernière
ou l'avant-dernière de trois maisons aimées : partie !
Dans l'art de perdre il n'est pas dur de passer maître.

J'ai perdu deux villes, de jolies villes. Et, plus vastes,
des royaumes que j'avais, deux rivières, tout un pays.
Ils me manquent, mais il n'y eut pas là de désastre.

Même en te perdant (la voix qui plaisante, un geste
que j'aime) je n'aurai pas menti. A l'évidence, oui,
dans l'art de perdre il n'est pas trop dur d'être maître
même si il y a là comme (écris-le !) comme un désastre.

[Traduction d'Alix Cléo Roubaud, Linda Orr et Claude Mouchard] 

mardi 12 janvier 2010

Ma nuit chez Maud

Ce n'est pas avec l'image que la parole entretient un rapport, mais avec un élément purement cinématographique: le dynamisme du plan, même si, comme dans ces deux cas, il est obtenu par la tension dans l'immobilité.
Eric Rohmer, Le goût de la beauté

[No es con la imagen con quien la palabra guarda contacto, sino con un elemento puramente cinematográfico: el dinamismo del plano, aún cuando el mismo, como en esos dos casos, sea obtenido a través de la tensión en la inmobilidad.]

dimanche 10 janvier 2010

AVANT-PROPOS


"Dans la vie, l'essentiel est de porter sur tout des jugements a priori. Il apparaît en effet que les masses ont tort, et les individus toujours raison. Il faut se garder d'en déduire des règles de conduite: elles ne doivent pas avoir besoin d'être formulées pour qu'on les suive. Il y a seulement deux choses: c'est l'amour, de toutes les façons, avec des jolies filles, et la musique de La Nouvelle-Orléans ou de Duke Ellington. Le reste devrait disparaître, car le reste est laid, et les quelques pages de démonstration qui suivent tirent toute leur force du fait que l'histoire est entièrement vraie, puisque je l'ai imaginée d'un bout à l'autre. Sa réalisation matérielle proprement dite consiste essentiellement en une projection de la réalité, en atmosphère biaise et chauffée, sur un plan de référence irrégulièrement ondulé et présentant de la distorsion. On le voit, c'est un procédé avouable, s'il s'en fut.
La Nouvelle-Orléans.
10 mars 1946."
Boris Vian, L'écume des jours, Paris, Pauvert, 1998, pp. 17-18



Peter Blake
Self-Portrait with Badges (1961)

Oil on board
1743 x 1219 mm

"En la vida, lo esencial es fomular juicios a priori sobre todas las cosas. En efecto, parece ser que las masas están equivocadas y que los individuos tienen siempre razón. Es menester guardarse de deducir de esto normas de conducta: no tienen por qué ser formuladas para ser observadas. En realidad, sólo existen dos cosas importantes en la vida: el amor, en todas sus formas, con mujeres hermosas, y la música de Nueva Orleans o de Duke Ellington. Todo o demás debería desaparecer porque lo demás es feo, y toda la fuerza de las páginas de demostración que siguen procede del hecho de que la historia es enteramente verdadera, ya que me la he inventado yo de cabo a rabo. Su realización material propiamente dicha consiste, en esencia, en una proyección de la realidad, en una atmósfera oblicua y recalentada, sobre un plano de referencia irregularmente ondulado y que presenta una distorsión. Como puede verse, es un procedimiento confesable donde los haya.
Nueva Orleans,
10 de marzo de 1946"
Boris Vian, La espuma de los días, Madrid, Alianza, 2004, p. 9 - Traducción de Luis Sastre Cid

jeudi 7 janvier 2010

Comprendre


Peter Doig
Hitch Hiker 1989–90
Oil on postal bags

"Para ver una cosa hay que comprenderla. El sillón presupone el cuerpo humano, sus articulaciones y partes; las tijeras, el acto de cortar. ¿Qué decir de una lámpara o de un vehículo? El salvaje no puede percibir la biblia del misionero; el pasajero no ve el mismo cordaje que los hombres de a bordo. Si viéramos realmente el universo, tal vez lo entenderíamos."
Jorge Luis Borges, "There are more things" en El libro de arena, Buenos Aires, Alianza, 2008, p.63

Pour voir une chose il faut la comprendre. Le fauteuil présuppose le corps humain, ses articulations et parties; les ciseaux, le fait de couper. Quoi dire d'une lampe o d'un véhicule? Le sauvage ne peut percevoir la bible du missionnaire; le passager ne voit pas le même cordage que les hommes d'abord. Si on voyait réellement l'univers, peut-être, on le comprendrait.

vendredi 1 janvier 2010

Couleurs







Rothko, Mark
White Center (Yellow, Pink and Lavender on Rose) 1950
205.8 X 141 cm - Huile sur toile





A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,

Je dirai quelque jour vos naissances latentes :

A, noir corset velu des mouches éclatantes

Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,

Golfes d'ombre ; E, candeur des vapeurs et des tentes,

Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d'ombelles ;

I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles

Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;

U, cycles, vibrements divins des mers virides,

Paix des pâtis semés d'animaux, paix des rides

Que l'alchimie imprime aux grands fronts studieux ;

O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,

Silence traversés des Mondes et des Anges :

- O l'Oméga, rayon violet de Ses Yeux ! -

Arthur Rimbaud, Voyelles



A negro, E blanco, I rojo, U verde, O azul: vocales,
diré algún día vuestros nacimientos latentes:
A, negro corsé velludo de las moscas brillantes
que zumban alrededor de hedores crueles,

golfos de sombra ; E, candor de los vapores y de las tiendas,
lanzas de los glaciares orgullosos, reyes blancos, escalofríos de umbelas;
I, púrpura, sangre escupida, risa de labios bellos
en la cólera o en las borracheras penitentes;

U, ciclos, vibraciones divinas de los mares verdosos,
paz de las dehesas sembradas de animales, paz de las arrugas
que la alquimia imprime en las grandes frentes estudiosas;

O, supremo clarín lleno de estridencias extrañas,
silencios atravesados por mundos y por ángeles:
-O el Omega, ¡rayo violeta de sus ojos!


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