"Dans la vie, l'essentiel est de porter sur tout des jugements a priori. Il apparaît en effet que les masses ont tort, et les individus toujours raison. Il faut se garder d'en déduire des règles de conduite: elles ne doivent pas avoir besoin d'être formulées pour qu'on les suive. Il y a seulement deux choses: c'est l'amour, de toutes les façons, avec des jolies filles, et la musique de La Nouvelle-Orléans ou de Duke Ellington. Le reste devrait disparaître, car le reste est laid, et les quelques pages de démonstration qui suivent tirent toute leur force du fait que l'histoire est entièrement vraie, puisque je l'ai imaginée d'un bout à l'autre. Sa réalisation matérielle proprement dite consiste essentiellement en une projection de la réalité, en atmosphère biaise et chauffée, sur un plan de référence irrégulièrement ondulé et présentant de la distorsion. On le voit, c'est un procédé avouable, s'il s'en fut.
La Nouvelle-Orléans.
10 mars 1946."
Boris Vian, L'écume des jours, Paris, Pauvert, 1998, pp. 17-18
Peter Blake
Oil on board
1743 x 1219 mm
"En la vida, lo esencial es fomular juicios a priori sobre todas las cosas. En efecto, parece ser que las masas están equivocadas y que los individuos tienen siempre razón. Es menester guardarse de deducir de esto normas de conducta: no tienen por qué ser formuladas para ser observadas. En realidad, sólo existen dos cosas importantes en la vida: el amor, en todas sus formas, con mujeres hermosas, y la música de Nueva Orleans o de Duke Ellington. Todo o demás debería desaparecer porque lo demás es feo, y toda la fuerza de las páginas de demostración que siguen procede del hecho de que la historia es enteramente verdadera, ya que me la he inventado yo de cabo a rabo. Su realización material propiamente dicha consiste, en esencia, en una proyección de la realidad, en una atmósfera oblicua y recalentada, sobre un plano de referencia irregularmente ondulado y que presenta una distorsión. Como puede verse, es un procedimiento confesable donde los haya.
Nueva Orleans,
10 de marzo de 1946"
Boris Vian, La espuma de los días, Madrid, Alianza, 2004, p. 9 - Traducción de Luis Sastre Cid
2 commentaires:
Génial et irremplaçable Boris, il nous manque toujours autant...
Merci deef! Et oui, Vian c'est...Vian!
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