vendredi 30 juillet 2010

Antinoüs

"La mort d'Antinoüs n'est un problème et une catastrophe que pour moi seul. Il se peut que ce désastre ait été inséparable d'un trop-plein de joie, d'un surcroît d'expérience, dont je n'aurais pas consenti à me priver moi-même ni à priver mon compagnon de danger. Mes remords même sont devenus peu à peu une forme amère de possession, une manière de m'assurer que j'ai été jusqu'au but le triste maître de son destin. Mais je n'ignore pas qu'il faut compter avec les décisions  de ce bel étranger que reste malgré tout chaque être qu'on aime. En prenant sur moi toute la faute, je réduis cette jeune figure aux proportions d'une statuette de cire que j'aurais pétrie, puis écrasée entre mes mains. Je n'ai pas le droit de déprécier le singulier chef-d'œuvre que fut son départ; je dois laisser à cet enfant le mérite de sa propre mort." 

Marguerite Yourcenar, Mémoires d'Hadrien, [Plon, 1958],  Paris, Gallimard,1974 , p. 189



["Sólo para mí la muerte de Antínoo es un problema y una catástrofe. Puede que ese desastre haya sido inseparable de un exceso de júbilo, un colmo de experiencia, de los que no habría consentido en privarme ni privar a mi compañero de peligro. Aun mis remordimientos se han convertido poco a poco en una amarga forma de posesión, una manera de asegurarme de que fui hasta el fin el triste amo de su destino. Pero no ignoro que hay que tener en cuentra las decisiones de ese bello extranjero que sigue siendo, a pesar de todo, cada ser que amamos. Al hacer recaer toda la falta sobre mí, reduzco su joven figura a las proporciones de una estatuilla de cera que, luego de plasmada, hubiera aplastado entre mis dedos. No tengo derecho a disminuir la singular obra maestra que fue su partida; debo dejar a ese niño el mérito de su propia muerte."]

Marguerite Yourcenar, Memorias de Adriano, Buenos Aires, Debolsillo, 2010, p. 157 - Traducción de Julio Cortázar

lundi 26 juillet 2010

Chéri

"Il remarqua que le ciel rose se mirait dans le ruisseau gorgé encore de pluie, sur le dos bleu des hirondelles volant à ras de terre, et parce que l’heure devenait fraîche, et que traîtreusement le souvenir qu’il emportait se retirait au fond de lui-même pour y prendre sa force et sa dimension définitives, il crut qu’il avait tout oublié et il se sentit heureux."

Colette COLETTE, La fin de Chéri, Paris, Calmann-Lévy, 1926, pág 105.


Marie Laurencin
Huile sur toile - 30.5 x 30 cm



["Él notó que el cielo rosa se reflejaba en el arroyo todavía cargado de lluvia y sobre el lomo azul de las golondrinas volando al ras del suelo; y porque la tarde se volvía fresca, y porque traicioneramente el recuerdo que llevaba consigo se retiraba hasta el fondo de sí mismo para tomar allí su fuerza y dimensión definitivas, él creyó que había olvidado todo y se sintió feliz."]

vendredi 9 juillet 2010

Le manuscrit

"J’ai eu la possibilité de consulter des notes manuscrites ajoutées par Marguerite Yourcenar à la transcription de ses propos enregistrés par Matthieu Galey pour l’édition de Les yeux ouverts, propos frappés de l’autorité et de la sérénité d’un auteur célèbre et vénéré, proche de sa quatre-vingtième année. Ces notes sont nombreuses et constituent des paragraphes importants. Elles sont écrites en quatre encres, noire, bleue, verte, mauve, qui se succèdent et se mélangent sans cohérence; de deux calligraphies, tantôt droite, tantôt penchée, elles aussi mélangées; les dernières lettres des mots étant souvent escamotées. Comme nous sommes loin de l’écriture “typographiée” de cet auteur aux longueurs de phrases les plus régulières, ponctuées avec soin, évitant tout enchaînement flou. Comme nous sommes loin du ton calme, presque détaché du texte. Qui était Marguerite Yourcenar?"

RICHAUDEAU, François, « La génétique du texte ou comment ils écrivent » dans Communication et langages, Nº 105, 3ème trimestre 1995, pp. 74-91


Lettre manuscrite de Marguerite Yourcenar (1935)

« Tuve la posibilidad de consultar notas manuscritas agregadas por Marguerite Yourcenar a la transcripción de sus palabras grabadas por Matthieu Galey para la edición de Les yeux ouverts, palabras sujetas a la autoridad y a la serenidad de una autora célebre y venerada, próxima a su octagésimo aniversario. Esas notas son numerosas y constituyen párrafos importantes. Están escritas en cuatro tintas, negra, azul, verde, violeta, las cuáles se suceden y se mezclan sin coherencia; en dos caligrafías, unas veces derecha, otras torcida, ellas también entremezcladas ; las últimas letras de las palabras a menudo escamoteadas. Cuán lejos estamos de la escritura « tipográfica » de esta autora de frases largas y regulares, puntuadas con cuidado, evitando todo encadenamiento flojo. Cuán alejados estamos de tu calma, casi desprendida del texto. ¿Quién era Marguerite Yourcenar ? »

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