HIATUS IRRATIONALIS
Choses, que coulent en vous la sueur ou la sève,
Formes, que vous naissiez de la forge ou du sang,
Votre torrent n’est pas plus dense que mon rêve ;
Et, si je ne vous bats d’un désir incessant,
Je traverse votre eau, je tombe vers la grève
Où m’attire le poids de mon démon pensant.
Seul, il heurte au sol dur sur quoi l’être s’élève,
Au mal aveugle et sourd, au dieu privé de sens,
Mais sitôt que tout verbe a péri dans ma gorge,
Choses, que vous naissiez du sang ou de la forge,
Nature, - je me perds au flux d’un élément :
Celui qui couve en moi, le même vous soulève,
Formes, que coule en vous la sueur ou la sève,
C’est le feu qui me fait votre immortel amant.
H.-P., août 29
Jacques Lacan, Le phare de Neuilly, 1933.
Giorgio Morandi
Natura morta (1952)
Huile sur toile - 40.64 x 46.04 cm
Cosas, ya fluya en vosotras el sudor o la savia,
Formas, ya nazcáis de la fragua o de la sangre,
Vuestro torrente no es más denso que mi sueño ;
Y, cuando no os golpeo con un deseo incesante,
Atravieso vuestra agua, caigo hacia la arena
Donde me arroja el peso de mi demonio pensante.
Solo, choca contra el duro suelo donde se eleva el ser
Al mar ciego y sordo, hacia el dios privado del sentido.
Pero, al perecer todo verbo en mi garganta,
Cosas, ya nazcáis de la sangre o de la fragua,
Naturaleza, -me pierdo en el flujo de un elemento :
Aquel que arde en mí, el mismo que os subleva,
Formas, ya fluya en vosotras el sudor o la savia,
El fuego me hace vuestro inmortal amante.
Agosto de 1929
Jacques Lacan, "Hiatus irrationalis" in Héctor Libertella (compilador), Literal 1973-1977, Buenos Aires, Santiago Arcos, 2002, p. 89 - Versión de Oscar Masotta
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